Je suis une artiste multidisciplinaire canadienne afro-caribéenne.
Je cherche à travers ma pratique de nouvelles façons de raconter nos histoires et ainsi revitaliser l’art de la narration orale en explorant l’art numérique et la réalité virtuelle. Mon travail s’articule autour de l’univers des contes et des proverbes des Antilles que j’explore dans une approche décoloniale.
Mon travail explore les interstices complexes de l’identité à travers mon parcours de femme noire immigrée, façonnée par les sociétés post-esclavagistes et post-coloniales des Antilles (Guadeloupe et Martinique), accentue ma quête de compréhension des legs historiques et ancestraux qui ont tissé le récit matriarcal pesant sur moi.
Diplômée de l’école régionale d’art Plastique de la Martinique du Diplôme Nationale des Arts et Techniques option Arts Graphiques (DNAT), rebaptisé depuis Campus caribéen des Arts.
Je vis et travaille à Tiohtiá:ke / Montréal depuis 2013.
DÉMARCHE
L’expression « femme potomitan » (pilier central) provient de la culture antillaise et tire son origine du créole. À l’époque de l’esclavage en Martinique ou en Guadeloupe, l’homme noir était relégué au rôle d’outil dans les champs ou simplement considéré comme un reproducteur, loin d’incarner pleinement le rôle de père au sein de la famille. Tout reposait sur la femme, à la fois mère nourricière et gardienne du foyer, responsable de transmettre la vie et les héritages culturels, le pilier central de la société et de la famille antillaise. Admirée pour sa résilience, sa détermination et son rôle central dans la préservation de l’identité culturelle antillaise et dans la transmission des valeurs culturelles et traditionnelles, elle est aussi associée à la spiritualité et à la connexion avec les traditions religieuses locales, souvent mêlées de croyances africaines, européennes et autochtones.
Comment décoloniser ce récit de mon corps et me libérer de l’obligation d’être une femme potomitan selon les normes imposées ? Comment articuler mon corps dans l’espace québécois, où il est continuellement et tacitement relégué à une position subalterne en raison de mon genre et de ma couleur de peau ?
Ces questions complexes et parfois douloureuses sont la matière première de ma démarche artistique. En tant que femme, afro, caribéenne, gardienne du savoir et des traditions de mes ancêtres, je cherche à ouvrir un dialogue sur la diversité des expériences immigrantes, la complexité de l’identité féminine et les défis que représente la décolonisation, c’est-à-dire, la déconstruction des récits et des stéréotypes hérités de l’époque coloniale.
Le conteur est né dans l’univers clos des plantations. Comme l’explique Patrick Chamoiseau dans son livre "Écrire en pays dominé, « Le conteur, c'est celui qui dans la plantation a ré-humanisé les êtres morcelés qui sont sortis du bateau négrier complètement désarticulé, démembrés, complètement hagards, ne parlant pas forcément le même dialecte et puis brusquement rendu au rang d’objet, abrutis, sortant du travail ». Le conteur a donc non seulement réussi à restaurer l’identité des hommes qui l’entouraient en leur fournissant un moyen parallèle et ésotérique de résistance, il a permis à une communauté de naître ou plus exactement à survivre en pays colonisé.  
Ces contes, comme l’ont été aussi certaines danses des Caraïbes, contenaient parfois un langage caché des plantations coloniales. Une codification des informations à transmettre à d’autres groupes d’africains libres ou non. Des messages transmis à travers les récits des mœurs de l’époque.
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